Comment, pourtant injustement méconnue, Marie-Clotilde, de Savoie, par son mariage courageux, a-t-elle fortement contribué à la constitution de l’unité italienne ?
Marie Clotilde est la fille de Victor Emmanuel II, roi de Piémont-Sardaigne lors de sa naissance, le 2 mars 1843 au palais royal de Turin. Elle grandit auprès de sa mère, Marie Adélaïde de Habsbourg, et de sa grand-mère, qu’elle adorait, Marie-Thérèse d’Autriche. Elle reçoit une éducation rigide et fait preuve d’une grande piété, d’humilité et de dévouement à autrui, notamment par ses actes de charité.
En 1855, elle n’a que 12 ans lorsqu’en quelques mois, elle fait face aux décès successifs de sa grand-mère, de sa mère, de son oncle Ferdinand et de son petit frère de quatre mois, Victor Emmanuel. Très affectée par ces disparitions, elle n’en assume pas moins sa charge de princesse, étant désormais la représentante féminine officielle de la Maison de Savoie.
Le 21 juillet 1858 a lieu l’entrevue de Plombières au cours de laquelle, Cavour et Napoléon III, sur un coin de table : conviennent d’échanger la Savoie et le comté de Nice contre l’aide militaire de la France, afin de combattre les Autrichiens. Cependant, la clause essentielle de cet accord est peut-être bien le mariage du cousin germain de l’empereur, Napoléon-Jérôme Bonaparte, avec la princesse Marie Clotilde, alors âgée de quinze ans seulement. Cette alliance, avec une famille royale respectée, devant permettre à Napoléon III, surnommé « Badinguet » et considéré comme un parvenu, de rehausser le prestige de sa monarchie et de renforcer sa diplomatie européenne. Pour le Piémont, c’était l’occasion d’amorcer le début de la constitution de la nation italienne.
Marché conclu, sauf que l’affaire n’était pas aussi évidente. Son père doit annoncer ce projet de mariage à Marie Clotilde, 15 ans, jeune fille pieuse et dévote se destinant vraisemblablement au couvent, avec Napoléon-Jérôme, surnommé Plon Plon, neveu de Napoléon 1er, âgé de 36 ans, libertin notoire et anticlérical affirmé !
Surprise, la princesse réserve sa réponse. Le prétendant lui fait peur. Elle demande à réfléchir et à faire appel à Dieu. Elle donnera son accord après avoir effectué une retraite durant l’été 1858 au palais royal de Valcasotto. Consciente de son rang de fille du roi, soucieuse d’aider son père et sa patrie, et désireuse de ramener à Dieu une âme qu’elle savait très éloignée de la religion, elle y consent par devoir.
Le mariage est célébré à Turin, le 30 janvier 1859. Le couple part s’installer à Paris à la cour impériale. Elle se montrera aimante et respectueuse de son mari, faisant preuve de ses grandes capacités de négociations. Indifférente aux artifices, aux toilettes et aux frivolités, elle saura néanmoins tenir son rôle princier, habituée qu’elle fut, plus jeune, aux réceptions à la cour de Turin de monarques étrangers les plus prestigieux. Cette attitude lui valut d’acquérir le respect
et la considération de son entourage, mais également de la population. N’oublions pas que les princesses étrangères n’ont jamais été bien acceptées, pour preuve Marie-Antoinette, que l’on surnommait « l’Autrichienne », dont on connaît le sort qui lui fut réservé, et Eugénie de Montijo, épouse de Napoléon III, « l’Espagnole ». Ce ne fut pas le cas pour elle, bien au contraire. Après la défaite de Sedan en 1870, ce fut la débâcle, tout le monde fuit, sauf Marie-Clotilde, qui écrit à son père, 10 jours avant de partir, la République étant proclamée : « Je suis française, une princesse de la Maison de Savoie ne quitte pas son pays en danger, ce serait le déshonneur ».
Elle se retirera d’abord en Suisse, puis au château de Montcalieri en poursuivant ses œuvres de charité. Son mari, prétendant au trône impérial, était rentré à Paris, espérant un revirement de situation. Marie-Clotilde eut la satisfaction de le ramener vers les sacrements au moment de sa mort.
Elle décède le 25 juin 1911 à Montcalieri. Vingt-cinq ans après son décès, l’archevêque de Turin introduisait sa cause de béatification au niveau diocésain et, le 10 juillet 1942, le Pape Pie XII déclarait Maria Clotilde princesse Serviteur de Dieu et l'instruction de sa béatification se poursuit encore actuellement.
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