J’ai évoqué la rue du Collège il y a peu, un monde d’adultes, de professionnels, de commerçants. Mais qu’en était-il de nous, les gamins, nombreux à Saint-Jean à l’époque du « baby-boom » ? Il doit être difficile pour les jeunes d’aujourd’hui d’imaginer notre enfance, apparemment i dépourvue de tout. Je me remémore une question d’une de mes filles : « dis papa, il y avait des Gaulois quand tu étais petit ? » Non - mais presque - si l’on se réfère à ce dont nous disposions pour nous divertir !
Qu’avaient-ils prévu et organisé, les adultes, pour leurs jeunes ? Je me souviens d’avoir fréquenté le patronage de la paroisse, animé par les abbés Lathoud et Taravel, dans les locaux attenants au cloître et dans la cour jouxtant l’étude de Maître Montmasson. J’ai également bénéficié, durant les vacances, d'un centre aéré hébergé sous le préau de ce qui était encore le collège de Jeunes Filles, en face de l’actuel Centre des Finances. Il y eut aussi une organisation scoute catholique comprenant une meute de louveteaux pour les plus jeunes dont je faisais partie, les Jeannettes pour les filles et les scouts pour les plus grands. Le local des louveteaux, initialement, était perché tout en haut de la sacristie de la cathédrale, sous le clocheton. Il fut ensuite transféré rue de l’ancien Hôtel de Ville, près de la tour aujourd’hui disparue, au-dessus du laboratoire du laitier M. Dufreney. Je crois que l’abbé Rosset fut partie prenante de ces organisations confessionnelles, lui qui gérait la colonie de vacances « les Écureuils » à Valloire. J’y fus « en colo » en 1953 avec ma sœur Marie-Noëlle. Un souvenir impérissable à bien des égards ! »
Toutes ces structures ne m’ont pas semblé pérennes, car, en dehors d’elles, nous disposions de vastes terrains de jeux improvisés, dans toute la ville et même au-delà. Toutefois, le seul équipement public exclusivement affecté aux enfants était les balançoires du jardin public (actuel jardin de l'Europe), près du mur toujours visible, côté rue Saint-Antoine. Une installation métallique redoutable (ce qui faisait son attrait), la sécurité, cela s’apprenait sur le tas. Seulement une chicane d’entrée à chaque extrémité. Pour le reste, il appartenait à chacun d’éviter ces masses métalliques volantes, un coup dans la tête eût sans doute été fatal. Je n’ai pourtant pas eu connaissance d’accidents graves.
Un autre espace de jeux s’offrait à nous en pleine ville : le terrain de foot, en pente comme le forum actuel. Bien entendu, on y jouait au ballon, mais le plus intéressant était les tribunes en bois, pour y grimper, évidemment, mais surtout, pour s’y glisser au-dessous : une magnifique cabane au centre-ville ! Le stade disposait lui aussi de quelque chose de mystérieux et inquiétant ; un souterrain dont l’ouverture, derrière la cage de buts amont, se poursuivait en direction du boulodrome et se terminait par un escalier et une porte, sous une structure en béton apparente en surface. Peu nombreux sont ceux qui l’avaient parcouru en entier. Je suppose que c’était un abri pour les temps de guerre.
Il n’y avait pas de toboggan dans ce parc, mais nous avions mieux : les plans inclinés du palais de justice, un de chaque côté. Qui n’y a pas usé ses fonds de culotte ? De mémoire, celui de gauche glissait plus que l’autre. Par chance, la concierge du bâtiment, Mimi Humbert, ne nous faisait pas trop la chasse ! Glisse toujours : nous avions des pistes de luge : le pré des sœurs, entre le couvent et le cimetière, les pentes de Rochenoire et ce que l’on appelait « entre les murs », le chemin partant de la rue Marcoz en logeant l’enceinte du collège, puis celle de la sous-préfecture.
Je n'oublie pas le patin à roulettes, très pratiqué rue du Collège et rue Saint-Antoine. On pouvait quasiment traverser sans s’arrêter entre Ruaz et Gervasoni et poursuivre jusqu’au champ de foire. Pour les carrioles, une planche avec quatre roulements à billes, les plus téméraires ont dévalé en trace directe depuis le pont du Bonrieux jusqu’au bas de la rue Saint-Antoine.
Mon récit serait incomplet si je ne mentionnais pas le magnifique ruisseau de la Torne avec son petit pont de pierre au début du chemin de Bonne-Nouvelle. Il a dû surement susciter des vocations d’hydrauliciens, tant nous y avons construits de barrages !
J’ajouterai les jeux traditionnels, passionnants qu’étaient les marelles dont les trottoirs étaient décorés, les billes à la sortie de l’école sur le champ de foire, les osselets …
Tout bien réfléchi, nous n’avons manqué de rien !
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